Le blog de Richard


Les impatients

La berge sud de la Méditerranée est en pleine ébullition, pour ne pas dire en feu, sans mauvais jeu de mots. Le mouvement d’émancipation perce même l’Iran. Se rendra-t-il en Corée du Nord?

Tout est si relatif.

Là-bas, on veut jeter les bases d’une certaine démocratie, on se bat pour des droits acquis chez nous depuis une génération ou plus.

Ici on se plaint contre le redoux hâtif, la prière dans les conseils municipaux, le déneigement qui tarde, la blessure récurrente à Markov.

Dans une autre vie professionnelle, à la tête du Forum francophone des affaires, j’ai bourlingué d’une mission économique à l’autre dans ce qu’on appelle les tiers marchés. Ces Maghrébins, ces Moyens-Orientaux, ces Caribéens, que je les ai trouvés patients. Mot poli. En fait, je les ai souvent trouvés fatalistes. Je n’ai jamais fait la part des responsabilités entre l’effet du soleil qui leur tape dessus et qui leur ralentit le système versus des réflexes d’anciennes colonies, syndrome aussi appelé bureaucratie. À moins que la foi si vive en des forces contre lesquelles on ne doit s’opposer soit la source la plus imputable de cette impatience cousine de l’inertie…

C’était hier. Tout bascule à vitesse grand W (pour Web).

Qui vivra verra si les nouveaux affranchis, pompés à bloc et forts de leur jeunesse nombreuse, ne provoqueront pas une foule d’autres avancements au point de rejoindre nos standards de droits et de démocratie.

Il y a bien longtemps qu’on a pris la rue ici. C’est nous qui sommes rendus les patients et eux, les impatients. Faut dire qu’elles sont tellement confortables, nos pantoufles.

P.-S.: des petits comiques ont quand même osé ce mouvement virtuel: 


De la parole verte à l’acte

Dire qu’on est écolo est pas mal plus facile que d’affirmer le contraire. C’est vertueux. C’est politiquement correct. Aujourd’hui, c’est quasiment obligé pour ne pas être regardé comme un attardé social!
Être écolo à la maison, ça va aussi assez bien. En tout cas, à l’épicerie et devant sa poubelle. Choisir des produits toxiques pour la santé humaine dans nos travaux de rénovation et de construction est devenu improbable, à moins que ce soit fait dans l’ignorance.
Poser des gestes verts dans nos entreprises, oh, c’est une autre paire de manches. Encore rares sont les marchands comme les usines ou les bureaux qui se dotent de politiques fermes et coercitives en la matière, et moins nombreuses encore sont les entreprises qui les appliquent avec rigueur et suivi.
Lavons notre linge sale entre nous, partageons l’état des lieux par le biais de réponses honnêtes à notre enquête. On saura où nos membres se situent et comment agir pour que tous et chacun ne soient pas en retard sur les courants sociétaux de fond qui s’installent…

Cliquez ici pour livrer votre situation et la comparer à celle des autres répondants.


Briseurs de rêves

Quand on décroche un emploi, c’est souvent un rêve. Aussi beau et grand que celui caressé par l’entrepreneur lorsque son projet d’affaires devient réalité. Jusqu’au jour où tombe, comme du plomb, l’implacable logique « sartrienne » voulant que « L’enfer, c’est les autres ».
Pour qui a une vue du monde du travail comme étant transactionnel plutôt que relationnel, l’entreprise devient un champ de batailles interrompues. Comme si chaque revendication d’employé enlevait quelque chose à la corporation et que chaque part de profit était gagnée sur le dos du personnel. Il faudrait une loi anti-briseurs de rêves…
En tout cas, si on disait : « trop fort ne casse pas », à regarder la couverture se déchirer sur la place publique entre l’employeur et les employés du Journal de Montréal, je me demande si ce n’est pas justement la trop grande puissance des deux parties qui pose le gros du problème.
Elle nous interpelle tous, la Commission parlementaire qui se penche sur la modernisation de la loi anti-briseurs de grèves. Si peu de quincailleries et d’usines de notre secteur sont syndiquées, tous nos membres peuvent techniquement un jour être convoités par les centrales syndicales. Et au-delà du mandat de la Commission, on est tous en quelque part affectés par la concentration des médias, toile de fond du problème abordé par les parlementaires.
Vieilli, pour ne pas dire passé date, quoique toujours en vigueur officiellement depuis 1977, le Code du travail ne prend pas en compte des réalités nouvelles, comme les télé-travailleurs et l’Internet. La notion de lieu de travail est encore basée sur le mortier et le béton. Quel décalage entre les termes légaux et le travail d’aujourd’hui!
À Québécor, le chat et les souris perdent leur temps à se courir après, comme l’ont fait aussi longtemps les boss et les employés de Pratt&Whitney, ce qui avait conduit à ladite loi anti-scab. Preuve que la législation est maintenant caduque car contournable.
Et si les empires tentaculaires que sont désormais tant les centrales syndicales que certaines entreprises étaient devenues des tueuses de l’entrepreneur pur et de l’employé authentique…?


L’étapisme libéral

Le mot étapisme est accolé au Parti québécois pour les raisons que l’Histoire connaît. Le gouvernement libéral semble s’en inspirer avec la nomination de Diane Lemieux à la tête de la Commission de la construction du Québec et l’arrivée de Lucien Bouchard à l’Association pétrolière et gazière du Québec, sans doute provoquée par le même gouvernement. L’étapisme du PQ n’est jamais parvenu à destination. Quel sort la population réservera à la démarche des petits pas de Jean Charest… 
Lemieux et Bouchard, deux citoyens au-dessus des lignes de partis, parmi les rares politiciens à avoir conservé la sympathie et une relative confiance du peuple, sont au pied de deux montagnes peut-être infranchissables, constituées de scepticisme et de cynisme.
Masochistes (ou maso schistes !) nos deux guerriers? En manque de travail ou de défi? Questions idiotes. Ce qu’ils ont en commun, c’est d’abord de croire en leur capacité personnelle. Ce sont en quelque sorte des êtres surdimensionnés. En fait, ils grandissent au fur et à mesure que les obstacles se dressent plus forts devant eux. 
Les deux nominés partagent également une non-allégeance libérale, du moins quand on regarde leur feuille de route jusqu’à hier. En acceptant leur mandat respectif, c’est comme s’ils avaient choisi d’appliquer leur intérêt pour la cause nationale du Québec sur deux cas concrets qui la bloquent selon eux : la suspicion gangrénée dans l’industrie de la construction et le projet économique de l’exploitation du gaz de schiste paralysé, pour ne pas dire miné.
Dans le cas de l’industrie de la construction, il faut bien admettre qu’il est anormal qu’on doive s’en remettre à une commission d’enquête comme recours pour nettoyer la maison alors que le Québec a des institutions clairement mandatées et payées pour faire cela, la CCQ en étant une, la Régie du bâtiment en étant une autre, et il y a d’autres mécanismes potentiels et réels. 
Pour les gaz de schiste, Me Bouchard se montre tant convaincu de l’importance économique de la nouvelle filière du point de vue des emplois, des recettes pour l’État et d’une plus grande indépendance énergétique pour le Québec, qu’il semble apte à s’accommoder raisonnablement d’un tango avec le parti qu’il a autrefois combattu. 
Étapes dans leurs carrières: certes. Terrains minés pour leur avenir personnel : possible. Issues de secours pour le gouvernement: probable. Débats de société en instance : sans doute.


Dites la vérité, toute…

Les victimes de Norbourg sont dédommagées, mais l’absence de procès parce que Vincent Lacroix a plaidé coupable porte ombrage à l’information publique. Les institutions fautives, ne serait-ce que par laxisme, s’en sortent avec une sorte d’amende…

Le commissaire Bastarache recommande, mais n’enquête pas plus loin, alors impossible de savoir si le politique subit des influences indues. Le loup garde beau jeu pour gérer ou non sa bergerie. Ici aussi, le public reste sur sa faim…
Coup sur coup, tous les deux sur fond de crise, maintes fois soupçonnés d’être trop près l’un de l’autre, les présidents de la Commission de la construction du Québec et de la FTQ- Construction abandonnent leur bateau – excusez mon allusion à la navigation de plaisance! Avec leurs départs, un autre patrimoine, bien que sombre et peut-être vilain, s’évapore avant que le public se penche trop sur leurs cas…
Et comment interpréter les accusations portées contre Bébé Doc en Haïti, sinon comme une affaire fignolée pour donner bonne conscience aux élus sans devoir aller au fond des choses.
Finalement, c’est rare et c’est notable les initiatives comme la Commission vérité et réconciliation osée par l’Afrique du Sud il y a quelques années, histoire d’aller au fond des choses, non par esprit revanchard ou pour pendre ses voisins, mieux encore, pour prévenir, pour faire école, pour devenir une meilleure société.
À tout prendre, entre la demi information accouchée d’ententes trop amiables, j’aime encore mieux l’excès de renseignements bruts, livrés par WikiLeaks et autres Robin des Bois modernes…


Lente heure

Le temps ne passe pas à la même vitesse pour tous et partout. Une année et un jour aux allures d’éternité sont passés depuis que sur l’île d’Hispaniola, le 12 janvier l’an dernier, en moins d’une heure,  la magnitude sept sur Richter était atteinte.

Avant le séisme, tout allait déjà mal en Haïti. C’était le pays le plus pauvre des Amériques, avec une population majoritairement analphabète, où les infrastructures routières étaient en si mauvais état que le transport du riz américain par bateau est plus facile que celui du riz local, pourtant de meilleure qualité et tellement plus productif pour l’économie du pays.

Maintenant que la capitale – qui est à la fois la métropole économique – est détruite aux deux-tiers et que trois des neuf millions de population sont déplacés et pour la plupart, parqués dans des camps, rien ne va s’amieuter, comme on dit dans ma région.

Malgré tout, on s’étonne ici de la lenteur des travaux de nettoyage et de reconstruction. On trouve aussi qu’ils prennent du temps à organiser leurs services de soins. On se demande où va l’argent qu’on leur a donné.

Quels donneurs de leçons on fait, nous, avec notre CHUM aussi vrai qu’un mirage, nos urgences d’hôpital mal foutues, notre financement de grands chantiers louche…


Bye Bye

Jamais on ne saura si la direction de Radio-Canada a choisi de ramener Véronique Cloutier et Louis Morrissette à la barre de l’émission de fin d’année plus pour laver son orgueil que pour faire suer le patron de Québécor avec lequel elle en arrache au Palais de justice. Laissons-les à leur lavage en public. Moi, s’il y a une race de monde que je ne peux tolérer et à qui j’aimerais dire Bye Bye, voire Adieu, c’est celle des amateurs de collusions.

Si je le pouvais, je contribuerais au financement du Bureau de la concurrence parmi les causes que je supporte.

Après les stations-services qui s’entendaient sur les prix à la pompe, l’organisme s’attaque avec raison aux entrepreneurs en construction qui contrôlent des marchés en faisant semblant d’organiser des parties golf. Puis cette semaine, c’était au tour des experts en ventilation de voir leurs ententes secrètes mises au jour.

Une telle attitude nuit à la réputation du monde des affaires et nous porte ombrage. Elle donne raison à ceux qui croient que la conspiration sévit partout. Pire, elle confirme ce que le penseur économique Adam Smith avançait au 18e siècle:

« Ceux qui partagent le même métier se réunissent rarement, même pour se divertir, mais leur conversation se fait inévitablement au détriment du public »

Note: Adam Smith, qui a vécu dans les années 1700, est considéré comme le père de l’école classique en économie.

Je souhaite à tous mes e-lecteurs un super Noël et un Jour de l’An merveilleux. Profitons-z-en pour méditer sur notre éthique commerciale…


Battre les frais pendant qu’ils sont hauts

« Monsieur Darveau, continuez votre bon  travail face à Visa et MasterCard. Ce matin, un acticle de la Presse Canadienne parait dans le journal La Tribune sur les frais des cartes chargés aux marchands. Lorsque ça se parle dans les médias c’est bon signe! »
Denis Bouchard
Bouchard Matériaux inc. 


Ce centre de rénovation Home Hardware du grand Sherbrooke a bien raison. Les médias ont tellement gagné en influence auprès de la caste politique que la grande couverture journalistique accordée à la décision du Bureau de la concurrence concernant le comportement contraignant et anticoncurrentiel de Visa et MasterCard vis-à-vis des marchands permet d’espérer, soit un jugement du tribunal qui nous soit favorable, soit une révision de l’attitude des émetteurs de cartes.

 
On se souviendra du cartel de l’essence impliquant plusieurs stations-services de régions du Québec. C’est en raison de la forte médiatisation d’une opinion du Bureau de la concurrence que tout avait ensuite été démantelé.

 
Si le tribunal tranche dans la foulée de l’opinion du Bureau de la concurrence, les marchands auront enfin le loisir de proposer aux consommateurs de payer en espèces ou par débit, méthodes qui coûtent moins cher aux marchands. De plus, les commerçants ne seraient plus forcés d’honorer toutes les cartes de Visa ou de MasterCard, notamment celles entraînant des coûts que les marchands trouveraient trop élevés.

 
À la clé, tout le monde sortirait gagnant d’un jugement collé sur l’opinion émise par la commissaire à la concurrence. Le consommateur saurait qu’il paie un plus juste prix lorsqu’il règle sa facture comptant ou par débit et il s’endetterait moins. Par contre, s’il a besoin d’utiliser une carte de crédit, il en connaîtra les coûts véritables. 

 
Ma prédiction? Même si aujourd’hui elles ruent dans les brancards et prétendent que leurs méthodes avaient pour objectif ultime de protéger les consommateurs, et que « si le Bureau a gain de cause, cela aura des conséquences négatives sur les consommateurs canadiens », Visa et MasterCard devraient se raviser avec une fourchette plus étroite des frais exigés des marchands entre le coût d’une carte ordinaire versus le coût d’une carte avec bonis. 

 
Quoi qu’il en soit, la Coalition des associations de marchands, dont fait partie l’AQMAT, devra avoir le souffle long pour maintenir informés les médias, les politiciens de même que l’ensemble de leurs membres détaillants et commerçants, car il est vraisemblable de croire que le Tribunal de la concurrence prendra une année avant d’entendre la cause. Une bonne cause, nous en sommes de plus en plus convaincus!


Fisc élevé: plus qu’une perception

On le savait, du moins on s’en doutait. Ce n’est plus juste une perception, c’est un fait. Une étude comparée de la Chaire de recherche en fiscalité de l’Université Sherbrooke révèle que les individus comme les entreprises, peu importe les paramètres de comparaison, paient plus de taxes et d’impôts au Québec qu’ailleurs au Canada.

Oui, mais on a plus de services qu’eux.

Je blague.

On n’a ni plus ni de meilleurs services que dans le reste du pays.

Et la situation n’ira pas en s’améliorant avec la taxe de vente qui passe de 7,5 % à 9,5% en deux ans, sans oublier la contribution à la caisse santé que projette d’ajouter le gouvernement actuel.

Ce qui me frappe, c’est l’écart. On nous charge en moyenne un cinquième de plus. C’est un gros pourcentage de différence. Si on zoome sur ce que paient nos entreprises en taxes sur la masse salariale, l’écart avec le reste du Canada grimpe à 63,2 %.

Pendant ce temps, Léger Marketing publie un sondage qui montre que 63 % des Québécois ne travaillent que pour l’argent. Pire, 82 % se disent stressés par les problèmes d’argent.

La prochaine Révolution s’annonce moins tranquille…

Fiscalité comparée: une utilisation prédominante des assiettes fiscales au Québec


Les rois nus

Et si WikiLeaks et l’émission Enquête de Radio-Canada et Rue89 et tous ces médias sociaux où on peut dénoncer, critiquer, étaient en fait, sous des habits neufs, l’expression de l’innocence, de la vérité, telle qu’incarnée en 1837 dans ce conte d’Andersen, où un enfant ose dire tout haut que le roi est nu, ce que tous savaient…
A consommer de tels médias, j’ai la même sensation que le jour où j’ai découvert que des ficelles tenaient les marionnettes que j’aimais tant. Par après, je ne voyais que les fils. 

Cela ne me réduit pas à un sceptique. Le doute ne m’habite pas en permanence. Il m’accompagne et avec lui, vient la douce sensation qu’apporte la vigie. Vous savez, ce Wouf! sec suivi d’un grognement que votre chien fait lorsque vous êtes seul à la maison la nuit. Sur le coup, il inquiète. Puis le calme d’après est plus profond. On a été inquiété, on est rassuré, content de pouvoir compter sur un veilleur.

Le journalisme nous atteint ou nous atteindra forcément quand on embrasse la place publique. Sa présence oblige tous et chacun à mieux se comporter et éventuellement, à mieux agir. Il signe l’arrêt de mort du Far-West. 

D’accord avec ça. Parce que s’il faut attendre la tenue de commissions d’enquête pour nous éclairer, vaut mieux s’habituer à vivre souvent dans la pénombre.