Le recyclage des vieux frigos : qui doit payer la note?

De plus en plus de centres de rénovation vendent des électroménagers. La question de la disposition des vieux appareils apparaît donc comme pertinente pour notre industrie. 

Les experts estiment qu’un réfrigérateur désuet mal récupéré risque d’engendrer autant d’émissions de CO2 qu’une voiture qui parcourt environ 17 000 kilomètres, soit plus que la moyenne annuelle des automobilistes québécois. La vaste majorité de ces anciens appareils contiennent des halocarbures, des composés qui ont des impacts majeurs sur le réchauffement climatique alors que certains congélateurs fabriqués avant l’an 2000 renferment même du mercure, une substance hautement toxique.

Que faire pour bien se départir de ses électros froids?

Bien que certains détaillants d’électroménagers et municipalités confient leurs appareils à des frigoristes qui récupèrent les gaz du circuit réfrigérant, très peu se soucient du traitement des gaz contenus dans les mousses isolantes ou des autres composantes polluantes. Depuis 2013, le programme de récupération FrigoResponsable permet de gérer la récupération et le recyclage de réfrigérateurs, congélateurs et autres appareils frigorifiques. Ce programme est le seul à utiliser une technologie permettant de recycler jusqu’à 96 % des composantes des appareils réfrigérants. C’est aussi le seul procédé qui capte et détruit 99,99 % des halocarbures contenus dans les appareils, mousse isolante comprise. Cette dernière contient jusqu’à quatre fois plus de gaz que le circuit réfrigérant lui-même!

De vieux appareils se retrouvent donc chez les recycleurs de métaux sans que quiconque puisse attester que les gaz ont été bien gérés.

RECYC-QUÉBEC invite les citoyens à passer à l’action en confiant leur appareil réfrigérant à un détaillant ou une municipalité membre du programme FrigoResponsable. La société d’État incite aussi les détaillants à prendre les devants avant que cela soit bientôt une obligation réglementaire et à devenir un détaillant certifié FrigoResponsable.

Surtout que de plus en plus de bannières de quincailleries et centres de rénovations vendent des électroménagers. La question de la disposition des vieux appareils apparaît donc comme pertinente pour notre industrie.

Une solution québécoise

Recyclage de vieux frigos chez PureSphera à Bécancour

Des pistes de solution existent. Une entreprise québécoise a développé l’expertise pour récupérer 95 % des gaz contenus dans un appareil réfrigérant domestique, y compris dans les mousses isolantes et les huiles frigorifiques contaminées. Chez PureSphera, à Bécancour, les électroménagers sont broyés dans un sas étanche qui capte toutes les émissions. Les mousses isolantes sont transformées en poudre et chauffées pendant huit heures afin d’être totalement décontaminées. La technologie, unique en Amérique, a été importée d’Allemagne à grands frais.

Mais depuis le début, elle comptait sur l’adoption d’« écofrais » sur les ventes de frigos afin de financer un système panquébécois de recyclage des vieux frigos.

Des écofrais sont un montant imposé sur la vente de certains appareils neufs qui est ensuite géré par l’industrie, mais obligatoirement consacré au recyclage des vieux appareils. Dans un projet de règlement publié par le gouvernement libéral en 2017, les écofrais étaient estimés à 60 $ par appareil.

Le règlement n’a jamais été adopté, et PureSphera fonctionne à 15 % de sa capacité, avec peu d’appareils et des pertes financières importantes. Ses dirigeants ignorent combien de temps ils pourront continuer.

Écofrais : vive opposition des magasins d’ameublement

En 2017, le gouvernement libéral avait publié un projet de règlement pour imposer des frais estimés à environ 60 $ sur chaque achat de réfrigérateur. Les sommes recueillies auraient été gérées par les détaillants qui vendent les appareils neufs, comme c’est déjà le cas pour divers produits dont le gouvernement veut favoriser le recyclage.

Le projet de règlement avait suscité une levée de boucliers. Des détaillants ont dénoncé l’idée de faire porter le fardeau aux consommateurs, et exprimé des craintes quant au risque de fermetures d’entreprises et de pertes d’emplois, notamment parce que la clientèle risquait de se tourner vers les détaillants ontariens, qui ne seraient pas soumis au nouveau règlement.

En 2018, à l’approche des élections, l’appétit des libéraux pour l’imposition de nouveaux frais aux consommateurs avait considérablement diminué. Selon nos informations, des voix s’étaient élevées contre le projet chez les députés, notamment ceux du caucus de la région de Québec.

Lorsque la possibilité d’imposer ces écofrais a été évoquée dans les médias de Québecor, en mars 2018, la ministre de l’Environnement de l’époque, Isabelle Melançon, avait immédiatement refermé la porte. « Pas question d’augmenter le fardeau pour détaillants et consommateurs », avait-elle déclaré sur Twitter.

Récemment, les Breault & Martineau et Ameublement Tanguay ont mis en garde le Premier ministre Legault contre l’imposition de frais de recyclage sur les ventes de réfrigérateurs. La mesure se traduirait par une hausse des prix bien plus grande que prévu et favoriserait les achats à l’extérieur du Québec, selon la direction de ces commerces. On craint que l’augmentation des prix atteigne jusqu’à 140 $ par appareil neuf.

L’entreprise souligne que les consommateurs qui iront comparer les prix en ligne pourraient constater que les détaillants en Ontario ou ailleurs ne sont pas soumis à ces écofrais et commander leurs appareils à l’extérieur du Québec.

 

 

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