L’AQMAT réagit vertement au projet d’allonger les heures d’ouverture les fins de semaine

Le ministre délégué à l’Économie avait promis de le faire, et il a – hélas – tenu promesse : Christopher Skeete autorise trois expériences pilote d’élargissement des heures d’ouverture des commerces.

À Laval, à Gatineau et à Saint-Georges de Beauce, les magasins pourront bientôt ouvrir leurs portes jusqu’à 20 h la fin de semaine, plutôt que 17 h.

Sur une base volontaire, pendant au moins une année, chaque magasin pourra décider ou non de prolonger ses horaires jusqu’en soirée, les samedis et les dimanches.

Les régions retenues permettront au gouvernement de comparer l’expérience en milieu urbain (Laval), en milieu rural (Beauce) et dans une municipalité frontalière avec l’Ontario (Gatineau).

Le ministre va plus loin, il préférerait que l’État n’impose pas d’heures d’ouverture aux commerces, que chaque établissement soit 100 % libre. Il affirme – à tort – que le Québec est le seul État à légiférer en matière d’heures d’ouverture.

Alors qu’au Conseil canadien du commerce de détail, on salue « cette flexibilité offerte aux commerçants », l’AQMAT voit les choses bien autrement.

« C’est plus dur que jamais tenir un commerce de détail. Les salaires ont crû depuis la COVID, s’approvisionner coûte plus cher, ce qui rapetisse la marge bénéficiaire », souligne Richard Darveau.

Mais le porte-parole des quincailliers entend interpeler le ministre sur d’autres facteurs, comme le défi de conciliation entre le travail et la vie personnelle : « Nos meilleurs employés, ceux qui sont diplômés ou expérimentés, expriment de plus en plus le désir d’avoir des loisirs les soirs et les week-ends. Les paradigmes ont changé. »

M. Darveau est déçu que le gouvernement prête plus l’oreille aux grandes surfaces généralistes, comme Walmart ou Costco, qui, n’offrant que des prix et de l’inventaire, trouvent intérêt à ouvrir le plus d’heures possible. « Le métier de commercer est un art délicat qui repose sur la connaissance des produits et un réel intérêt pour les clients qui expriment des besoins en conseils, souvent d’ordre technique, ce que des plages horaires étendues ne permet pas d’offrir ».

L’AQMAT l’a souvent répété : pour concurrencer à la fois les plateformes sur Internet et les géants généralistes, on a besoin d’un gouvernement qui est sensible à la réalité des propriétaires-marchands et de leurs employés-clés, ce qui doit se traduire par des mesures de protection de leur expertise.

Le slogan que l’AQMAT avait lancé lors des premières intentions du gouvernement de revoir les heures d’ouverture dans les magasins demeure encore d’actualité : « Ouvrez moins, mais ouvrez mieux ».

Quant à l’affirmation du ministre à l’effet que le Québec fait cavalier seul, cela est faux. Voici quelques exemples :

  • au Manitoba, on ne peut faire commerce les dimanches qu’entre 9 h et 18 h;
  • au Nouveau-Brunswick, on ne peut ouvrir les dimanches, sauf si la municipalité vote un règlement en ce sens, ce qui est rare;
  • dans la plupart des villes de l’Île-du-Prince-Édouard et de Labrador-Terre-Neuve, il n’est pas possible de commercer les dimanches.

Ailleurs dans le monde :

  • il est interdit d’ouvrir un commerce les dimanches en Allemagne, en France, en Hongrie, en Pologne
  • l’ouverture les dimanches est réservée à quelques heures en Grande-Bretagne;
  • on ne peut ouvrir que quelques dimanches par année en Croatie;
  • les heures d’ouverture les jours de semaine et les samedis sont aussi encadrées par des lois dans 8 autres États européens, dont l’Autriche, la Belgique, l’Espagne et les Pays-Bas.

Cela étant, le président de l’AQMAT sourit jaune quand il voit que sous l’influence du ministre Skeete, le Québec voudrait imiter les États-Unis, un pays où la libre-concurrence sans mesure d’encouragement à l’égard du patrimoine entrepreneurial a pratiquement tué les vrais commerces : « Quand on visite par exemple la Floride où tout est permis, il devient quasiment impossible de trouver un commerce indépendant ».

M. Darveau conclut : « En quincaillerie, ici, on n’a pas de franchises. On est constitué de marchands-propriétaires et de grappes régionales appartenant à des familles qui arrivent à faire commerce aux côtés de géants comme Home Depot justement parce que nos gouvernements ont vu à les protéger et à les promouvoir ».

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