Deux quincailleries américaines, non pas victimes, mais auteurs de vols de millions de dollars

Deux centres de rénovation situés dans le comté de Los Angeles opérant sous le nom de DJ General Tool & Wire ont servi de façades à un réseau sophistiqué de vol de cargaisons d’une valeur estimée à 4,5 millions de dollars américains. Les produits volés provenaient de trains, camions et bateaux de transport. Parmi eux : outils électriques, vélos électriques et appareils ménagers de marques prestigieuses comme Dyson, Milwaukee, DeWalt et Makita.

Tentons de démonter le stratagème employé par les voleurs.

  1. Le détournement de cargaisons

Les marchandises visées provenaient de trains, camions et navires en transit dans le sud de la Californie. Les enquêteurs notent que les criminels utilisaient des techniques de plus en plus sophistiquées :

  • ouverture de wagons ou conteneurs stationnés dans des zones vulnérables;
  • interception de camions sur leurs trajets, parfois grâce à des complicités logistiques;
  • identification ciblée de produits à forte valeur de revente rapide (outils électriques, électroménagers, vélos électriques);

L’objectif : saisir des lots homogènes et faciles à écouler.

  1. Le “blanchissage” de marchandises via des commerces de façade

Le cœur du stratagème consistait à utiliser de véritables quincailleries comme couverture :

  • les biens volés étaient livrés directement aux magasins DJ General Tool & Wire à Montebello et Huntington Park;
  • une fois dans les rayons, ces produits semblaient légitimes, noyés parmi des stocks réguliers;
  • les clients, particuliers et petites entreprises, pouvaient ainsi acheter sans soupçonner l’origine criminelle.

Cette technique brouille la frontière entre commerce légal et illégal, compliquant le travail des enquêteurs.

  1. Revente en ligne

Au-delà des ventes en boutique, une partie du stock volé était écoulée sur des plateformes de commerce électronique.

Cela permettait :

  • d’élargir le bassin d’acheteurs bien au-delà du quartier;
  • les prix, souvent inférieurs à ceux des détaillants officiels, assuraient un écoulement rapide;
  • les criminels profitaient de l’anonymat relatif des plateformes pour masquer les flux financiers.
  1. Fragmentation et complicité

Le réseau fonctionnait en chaîne d’approvisionnement parallèle :

  • des groupes distincts s’occupaient du vol initial;
  • d’autres assuraient le transport et l’entreposage;
  • les commerçants de façade se chargeaient du recyclage légal des biens.

Selon les autorités policières, chaque maillon est désormais visé : du voleur de cargaison jusqu’au détaillant de quartier.

  1. Un modèle transposable ailleurs

Ce cas illustre un modus operandi classique dans le crime organisé international :

  • créer un point d’ancrage légal (commerce ou entrepôt);
  • insérer des produits volés dans un flux commercial ordinaire;
  • revendre localement et en ligne pour légitimer les profits.

C’est ce qu’on appelle dans le jargon policier une opération de “fencing” (recel organisé).

En résumé, les voleurs détournaient des cargaisons entières de produits à forte valeur, puis les intégraient dans les stocks de quincailleries servant de façade, avant de les écouler en magasin et sur Internet. Le stratagème reposait sur la crédibilité d’un commerce légal pour masquer une économie parallèle florissante.

Le propriétaire des magasins, Dojoon Park, 41 ans, a été arrêté pour possession de biens volés. Le bureau du procureur du comté vise des accusations sévères, assorties de peines maximales de prison d’État.

Le service de police de Los Angeles (LAPD), a souligné que « le vol de cargaisons n’est pas un crime sans victimes », affectant les autres détaillants, les manufacturiers et les consommateurs. Il a rappelé l’importance de protéger la chaîne d’approvisionnement pour la stabilité économique.

Le procureur a averti les réseaux criminels : « Nous vous traquerons. Si vous pensez pouvoir voler nos institutions, pensez autrement… Votre prochaine plateforme ne sera pas en ligne, mais une prison »

Les autorités observent une élégance croissante dans les méthodes utilisées pour détourner ou intercepter des biens de valeur en transit dans le sud de la Californie.

Commentaire de Richard Darveau, président de l’AQMAT : « Même à distance, les entreprises québécoises s’appuyant sur l’importation depuis des ports doivent rester vigilantes; ce type d’opération illustre la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement, même dans des économies modernes ».

Il ajoute : « On voit les effets des efforts coordonnés de la police traditionnelle avec la police ferroviaire et portuaire. Adopter des pratiques similaires au Canada — notamment dans les ports de Montréal ou Vancouver — peut renforcer la résilience de nos réseaux commerciaux ».

Il est en effet crucial de bien vérifier la provenance des biens, surtout lorsqu’ils proviennent de distributeurs secondaires ou en ligne. Des audits réguliers, l’utilisation de données de traçabilité logistique et de mécanismes de surveillance peuvent réduire les risques.

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