LE BLOGUE DE RICHARD : Plus de vols dans les quincailleries : retour sur des points de bascule

Dans les derniers jours, successivement au téléjournal de TVA, dans le Journal de Montréal et de Québec, sur les ondes du 98,5 et autres radios, j’ai tenté de comprendre et d’expliquer l’augmentation notable du vol à l’étalage dans les quincailleries et autres commerces.

On peut accuser la pauvreté et l’inflation. Les gens auraient moins d’argent qui leur reste dans les poches, ce qu’on appelle le revenu disponible.

Les faits disent le contraire : au cours des deux dernières décennies, le revenu disponible par ménage au Québec a connu une augmentation significative. Selon les données de Statista, le revenu annuel médian par ménage, entre 2018 et 2024, est passé de 64 795 $ à 81 756 $, soit une augmentation de 16 961 $.

Quant à l’inflation, rien pour écrire à sa mère : elle s’élevait à 2,3 % en 2018, est demeurée stable autour de 2 % en 2019, a chuté en 2020 en raison de la pandémie, est repartie à la hausse en 2021 et a culminé en 2022, sous l’effet de la reprise économique, des hausses des prix de l’énergie et des perturbations des chaînes d’approvisionnement. En 2023, l’inflation a commencé à se modérer, et en 2024, elle s’est stabilisée à nouveau à 2,3 % selon l’Institut de la statistique du Québec.

Il faut donc regarder ailleurs.

D’abord, parlons du ratio employés/clients et des trop longues heures d’ouverture. Quand le concurrent ouvre les soirs et les week-ends, on se sent souvent obligés de suivre, bien qu’on soit à court d’employés. Avec environ 29 000 postes vacants dans le secteur du commerce de détail, de nombreux détaillants fonctionnent avec des effectifs réduits, ce qui a entraîné une diminution du nombre d’employés disponibles pour servir les clients… et surveiller les autres.

Remémorons-nous aussi les mesures sanitaires conséquentes de la COVID. Elles ont amené les commerçants à ne plus pouvoir intervenir quand un individu entre masqué, voire cagoulé.

Et les droits individuels de la personne que certains appellent le mouvement woke, fortifié depuis ces récentes années.

De manière concomitante, ces trois phénomènes viennent en quelque sorte hypothéquer toute intervention auprès des suspects; on ne peut plus intercepter un client en magasin comme avant, et lui demander de se découvrir.

Or, qui vole? Celui ou celle qui calcule le gain possible par rapport au risque de se faire prendre. Moins le risque est grand, plus l’intérêt de voler augmente. C’est la triste loi de l’homme. Ou plutôt de l’hommerie, terme ancien qui réfère à la petitesse humaine, aux défauts de l’espèce humaine.

À tous ces points en aval, ajoutons la montée en puissance des plateformes de revente en ligne de marchandise qui, en amont, ont créé des marchés parallèles pour les voleurs à l’abri de tout contrôle d’identité et de véracité transactionnelle.

J’ai donc continué de cogner sur le même clou, soit l’absence d’obligations légales pour les gens qui proposent de la marchandise neuve sur des sites comme Marketplace et Kijiji de diffuser une photo de facture prouvant que le produit a bel et bien été acheté.

En corolaire, les autorités pourraient aussi imposer à ces plateformes de diffuser un message de prévention d’intérêt public, du genre : « Exigez de voir la facture du produit convoité afin d’éviter d’être éventuellement accusé de recel. »

Pour lutter contre ce fléau, l’AQMAT envisage de recommander l’utilisation de technologies comme la reconnaissance faciale, tout en s’assurant du respect des lois en vigueur.

Il y a aussi de la sensibilisation à faire au niveau des manufacturiers afin de les amener à utiliser la RFID (Radio Frequency Identification) au lieu du code-barres vieillot et limité.

La RFID coûte environ 2 à 10 fois plus cher qu’une étiquette à code-barres. Cependant, elle réduit considérablement les pertes, les erreurs de stock, et les temps de gestion, ce qui peut compenser le coût initial, surtout dans les environnements à forte rotation ou à haut risque de vol (comme les quincailleries). L’adoption de la RFID est en hausse dans certaines grandes chaînes (ex. : Decathlon, Walmart, Uniqlo), mais reste limitée dans les PME à cause du coût initial de l’infrastructure (lecteurs, logiciels, formation).

Mais la différence en bout de course serait notable : une scie ronde volée possède le même code-barres que toutes les autres scies rondes du même fabricant, du même modèle. Ceci a pour effet que la police ne peut prouver hors de tout doute qu’un individu possédant un tel objet neuf vient de le voler.

La RFID est en quelque sorte un ADN : chaque item a son propre code et, qui plus est, est traçable : la police peut donc avoir l’assurance qu’il s’agit de l’objet volé et grâce au tracking, peut aller cueillir le voleur chez lui!

Chaque code-barres coûte entre 0,01 $ à 0,05 $ alors que chaque RFID coûte entre 0,10 $ et 0,30 $.

On en revient à une question de cennes par objet.

Quand aurons-nous la maturité de discuter tous ensemble des remèdes à nos maux?

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