Faire campagne avec les bannières

En juin, les présidents et chefs de la direction des bannières et groupements suivants ont accepté de m’accueillir : BMR, Castle, Home Depot, Home Hardware, Lowe’s Canada, Patrick Morin et TimberMart. Et je les remercie pour leur précieux temps.

Je vous ai déjà mentionné que je pars en campagne. En campagne électorale en deux temps : on aborde le Québec, vu l’élection générale du 1er octobre 2018, puis ce sera le tour du Canada tout entier avec en perspective l’élection prévue le 21 octobre 2019.

Ma croisade vise à engager les bannières sur deux enjeux que traverse notre secteur: le développement du talent en quincaillerie et la croissance de la part du marché domestique prise par les produits faits dans des usines au Québec et au Canada.

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L’Association québécoise de la quincaillerie et des matériaux de construction (AQMAT) a mené depuis 18 mois un projet pilote de certification des compétences et du comportement des conseillers-vendeurs.

Soyons clairs : le briefing d’un manufacturier ne rend pas un employé apte à informer et à conseiller objectivement le consommateur moderne qui, huit fois sur dix, a déjà fait d’amples recherches avant de se présenter en magasin.

Ne voulant pas baser un projet sur des données empiriques, on a commandé une étude indépendante à la firme Lanla, spécialisée en expérience client. Le constat révélé à notre congrès 2017 a été dévastateur : les deux-tiers des 40 consommateurs incognito qui ont présenté un projet à 40 centres de rénovation de bannières différentes, de diverses tailles et régions, ont considéré que le bagage de connaissances des conseillers-vendeurs n’est pas à la hauteur de leurs attentes, pas plus que leur degré d’engagement relationnel.

Puisqu’il est hors de question que j’assiste passivement à la perte progressive des magasins en briques et en béton face à l’Internet, je dis clairement aux patrons des bannières qu’il nous faut agir là où le bât blesse le plus : amener les conseillers-vendeurs à être de meilleur conseil, doublés de meilleures capacités de vente.

Le perfectionnement de leur savoir (connaissances), de leur savoir-être (comportement) et sans oublier leur savoir-faire (parce qu’on évolue dans un contexte technique) fait partie de la solution. La rétention des effectifs dits de premier trio par des plans de carrière aussi.

C’est pourquoi nous avons créé le Collège AQMAT avec la mission première de procéder au perfectionnement certifié et reconnu des conseillers-vendeurs et en corollaire, de coacher leurs superviseurs pour qu’ils sachent mieux reconnaître le talent, l’encadrer et le conserver.

À ce jour, 89 employés de vos divers magasins ont été certifiés à l’issue de six journées en classe, coiffées d’un examen rigoureux où la note de 80 % était requise; nos exigences étant élevées, plusieurs ont d’ailleurs dû avoir accès à l’examen de reprise pour obtenir leur certificat et une seule employée en peinture a réussi la note de passage par reconnaissance des acquis sans être astreinte au cours de six jours.

L’expérience a cependant généré des dépenses de plus de 300 000 $. C’est trop pour être supporté seul par l’organisme sans but lucratif que nous sommes. Et surtout, le rythme de certification est trop lent. Il nous faut perfectionner des centaines de conseillers-vendeurs et de superviseurs par année pour espérer faire une différence en cette ère hautement technologique où les paradigmes du « magasinage » changent à vitesse grand V.

Des investissements en adaptation de contenus et en infrastructures physiques de télé-diffusion sont nécessaires : le Collège AQMAT doit développer non seulement d’autres contenus de cours (matériaux, plomberie, électricité, etc.), mais aussi concevoir une version web en temps réel des cours en classe, apte à satisfaire les besoins des régions éloignées et des quincailleries qui peuvent difficilement se passer de leurs employés-clés pendant plusieurs jours de suite.

Pour compter sur des assises financières plus solides, j’ai donc créé un concept de Cofondateurs du Collège AQMAT où les bannières et groupements d’achat ainsi que les fournisseurs dominants dans leurs segments de marchés sont appelés à participer en commun à son financement.

Le Collège AQMAT doit disposer d’un fonds de commerce suffisant pour opérer, étant entendu que les frais de cours seront couverts par les revenus provenant des inscriptions et que des programmes de subvention existent pour créer de nouveaux certificats par année.

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Le problème de la rétention d’employés talentueux et dédiés aux fins d’améliorer l’expérience des clients et de favoriser leur fidélité déborde de la question de la formation continue du personnel déjà en place. Il oblige à des efforts en amont, ce que j’appelle l’attractivité de notre secteur d’activité.

Je soumets aussi aux bannières l’idée de mettre nos forces en commun pour occuper un espace public auprès de personnes cibles pouvant pourvoir aux postes à combler dans les magasins comme dans les usines de notre secteur économique.

Il y a selon moi une opportunité d’attirer l’attention en particulier des jeunes retraités et des nouveaux arrivants vers nos régions et notre industrie. Comme OSBL, l’AQMAT a accès à des aides financières de la part des gouvernements pour élaborer une campagne de promotion des carrières en quincaillerie et matériaux.

Plusieurs idées sont sur la table, dont une tournée des centres commerciaux, un stand dans les foires de l’emploi et la création d’un espace virtuel où on vanterait notre secteur, nos entreprises et les emplois disponibles. On pense aussi à une semaine thématique à date fixe où la population visée serait invitée à nous découvrir et à s’intéresser à nos commerces et fournisseurs.

Bien sûr, chaque bannière est invitée à poursuivre ses actions de recrutement en solitaire; la piste ici envisagée étant de créer un wow national pro industrie de la quincaillerie et des matériaux dont les bénéfices rejailliront sur tous.

Le soutien des bannières à une offensive de promotion de l’emploi et des carrières dans notre secteur d’activités est donc sollicité.

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Le succès de notre industrie dépend également de la santé des fabricants de produits qui approvisionnent les réseaux de marchands corporatifs et affiliés des bannières. On a jusqu’à ce jour laissé le libre marché dicter ses lois, si bien qu’aucune bannière n’accorde en continu aux produits d’ici des avantages spécifiques par rapport aux produits d’ailleurs.

Pendant ce temps, d’autres secteurs jouent à fond les cartes « Fait au Québec, Design local, Assemblé au Canada ». Que ce soit en agro-alimentaire, dans la mode, dans le meuble, les articles de sport, etc., les associations sectorielles ont vu à regrouper les acteurs de leur filière et à les fédérer autour d’un logo et d’un slogan communs.

Qui plus est, nos voisins américains depuis bien avant Obama et l’arrivée de Trump, en fait depuis l’avènement du Buy American Act en 1933, incitent, pour ne pas dire forcent les autorités de leur pays et même les dirigeants d’entreprises à privilégier l’achat protectionniste.

En décembre 2017, l’AQMAT a lancé le programme Réno Export avec l’appui du gouvernement du Québec dans le but de soutenir la diversification des marchés extérieurs pour nos entreprises manufacturières. L’initiative, bien que saluée par la quarantaine d’opérateurs économiques participants, ne doit pas nous faire oublier que nous n’avons en place aucun outil pour stimuler l’achat par les consommateurs et les entrepreneurs de produits manufacturés au pays.

Allez en Allemagne, on vous proposera d’abord et avant tout des produits faits en Allemagne. Allez au Japon et bonne chance pour trouver un produit promu sur des bases égales qui n’est pas fait localement. J’arrive de Chine et dans tous les magasins, les produits chinois prenaient la vedette.

Sortons de notre réserve qui nous rend poreux et nous fragilise, comme économie et nation. Le tissu manufacturier du Québec comme celui du Canada tout entier ont besoin de s’appuyer sur plus de loyauté pour espérer maintenir les emplois qu’ils créent et détenir ainsi suffisamment de ressources pour augmenter leurs capacités de recherche, d’innovation et de productivité.

Nous évoluons sur un terrain fertile pour promouvoir les produits d’ici du fait que la maison est un bien culturel et émotionnel. De ce fait, les propriétaires seront naturellement portés vers des articles de quincaillerie et des matériaux de construction conçus, assemblés et possiblement fabriqués localement, cela avec la même ferveur qu’ils privilégient les fraises ou les artistes d’ici, prérogative dont ne peuvent bénéficier l’automobile, le pharmaceutique et tant d’autres filières où on ne constate pas le même développement vertical que chez nous.

La réalité dite de proximité s’illustre remarquablement par les matériaux issus de la forêt. La très grande majorité des scieries du Québec et des autres régions du Canada aimerait développer des relations fécondes et durables avec les centres de rénovation de leur région et de leur pays. La vérité est que ces moulins et transformateurs sont rares à privilégier nos marchands, leur préférant des ventes en vrac et en gros volume vers les États-Unis. Je pense que la table est mise, considérant ce surcroît de protectionnisme du côté américain et les remises en question répétées de la libre circulation des biens entre nos deux pays. Si tous ensemble on affiche un préjugé favorable à l’égard des produits de qualité faits ici, je suis convaincu que les scieries consacreront plus d’énergie à commercialiser des matériaux à valeur ajoutée pour notre marché domestique.

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En parallèle à mes rencontres avec chaque haute-direction de bannière, en toute transparence, je ne leur cache pas que les démarches se poursuivent avec les deux niveaux de gouvernement. Leur ouverture est là, grande même.

Le pouls pris du côté des manufacturiers est aussi fort enthousiaste.

Pour remédier à la situation, j’ai conçu le projet Bien fait ICI. L’expression sous-tend à la fois que les produits qui arboreront ce logo seront réellement fabriqués ici et seront de qualité.

Les directions des bannières et groupements d’achats en quincaillerie ont le pouvoir d’aider les manufacturiers et ce faisant, de positionner leurs marchands comme étant de bons citoyens, solidaires et connectés sur leur milieu. Toute la chaîne trouvera son compte dans la création d’un mouvement collectif en faveur de l’achat local dans notre secteur d’activité.

Je leur demande donc de mettre l’épaule à la roue, un peu par des contributions financières, mais surtout en acceptant de servir la campagne avec leurs propres médias que sont leurs circulaires, leurs sites web et médias sociaux et bien entendu, leurs réseaux de magasins pour fins d’affichage et de distribution de dépliants sur Bien fait ICI.

Je m’en serais voulu de ne pas leur annoncer en primeur que le Canal V a accepté de diffuser une série télévisée de 13 épisodes sur la campagne Bien fait ICI pendant lesquels un multiplex fait de matériaux locaux de la cave au grenier sera mis en chantier.

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Bref, sans les bannières, sans chacune d’elle, je peux faire un bon bout de chemin tout seul. Avec elles, tous ensemble, on peut s’assurer de relever avec tellement plus de brio les enjeux cruciaux liés à une meilleure expérience client en magasin.

Président et chef de la direction

 

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