Prévisions hasardeuses du marché résidentiel

Bien malin est celui ou celle qui peut prédire ce que les marchés de la construction neuve et de la revente seront pour les mois à venir.  

Il est plus facile d’affirmer que la réno va continuer de carburer à plein régime, comme on le constate depuis le début de la pandémie. 

La maison devient plus que jamais le cocon, le repère, le lieu où on la population se sent à l’abri et heureuse.  

On va investir selon moi des sommes records en amélioration de la déco, en création d’espaces utiles et agréables, en aménagement de cours et de terrasses et balcons, en jardinage. 

La tendance ne tarira pas de l’été, elle se poursuivra à l’automne, les citoyens voulant bien préparer leur demeure pour s’y retrouver, s’y réfugier une fois les temps froids annoncés et peut-être, une deuxième vague de crise sanitaire appréhendée.  

Maisons neuves 

Pour prévoir comment se comporteront les statistiques de mises en chantier, c’est une tout autre histoire; urécit qui se réécrit chaque jour et dont l’issue reste inconnue.

On se sent comme dans ce genre de télésérie où les auteurs doivent réagir à un succès inespéré et se mettent à improviser une deuxième saison, puis un troisième, rarement aussi réussies que l’initiale. On n’est plus dans le scénario bien contrôlé où on croyait les personnages centraux quand ils nous disaient « Ça va bien aller ». On est plutôt à se demander si le récit tient la route et surtout, si les protagonistes au volant savent où ils vont… 

Le garrot mis sur l’immigration, l’inquiétude des contribuables à l’égard de l’état des finances publiques et de leur propre état de santé physique sont au nombre des variables pouvant amener des acheteurs à reporter leurs ambitions. 

Ce qui motive les économistes de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) à lancer depuis hier qu’au Québec, la baisse du nombre de chantiers résidentiels pourrait atteindre le seuil de 53 %, voire 80 %, pour ne reprendre du poil de la bête qu’à compter de 2021. 

Rappelons aussi une grande vérité : le temps perdu ne se rattrape plus. Il y eut arrêt complet pendant huit semaines, toutes les mises en chantier ayant été stoppées le 15 mars pour ne reprendre dans toute leur intégrité que le 11 mai.  

Sans compter que les travaux ne peuvent être menés aussi rondement en raison des règles de distanciation sociale et d’hygiène, certes, mais aussi d’un plus grand absentéisme de travailleurs de la construction dont certains sont inquiets, testés positifs ou responsables de proches souffrant de la pandémie. 

Revente de maisons 

Les propriétaires actuels devront s’armer de patience avec leur pancarte « À vendre » ou prendre la décision de reporter au printemps 2021 leur intention de réaliser une transaction. S’ils persistent à vendre, ils devront sans aucun doute accepter un prix moindre que ce qu’ils auraient pu obtenir avant le coronavirus. 

La SCHL souligne l’incertitude du moment et pronostique sous un mode pessimiste : l‘agence fédérale estime la baisse des prix d’entre 9 % et 18 %, même pire dans les régions productrices de pétrole. Les prix devraient se redresser d’ici le milieu de 2021, prévoit l’agence. 

Pour sa part, la Banque Nationale annonce une baisse des prix de vente des maisons existantes de 10 %, rien de dramatique. La CIBC est encore moins alarmée avec une prévision de chute des prix de 5 à 10 % par rapport à la même période en 2019. La TD y va d’un chiffre précis : baisse de 6,1 %. 

La pression à la baisse sur les prix viendra avec la baisse des achats de maisons neuves comme existantes, notamment en raison des pertes d’emploi ou des conditions réduites qu’ont dû accepter plusieurs travailleurs. La SCHL en déduit que le nombre de ventes baissera de 19 % à 29 % par rapport au niveau antérieur à la pandémie. 

La trésorerie fragilisée de plusieurs ménages pourrait engendrer un nombre record de faillites, d’où une perte pour les banques qui pourraient alors devenir plus réticentes à prêter. 

Conclusion 

Si j’étais fabricant ou marchand, j’orienterais définitivement mes inventaires vers les produits et services afférents au marché de la rénovation. Et en corollaire, à celui que j’appellerais de valeur ajoutée. Vous savez, ces travaux, ces accessoires qui viennent donner un oumf à une propriété et égayer la vie de ses occupants. 

À l’AQMAT, nous allons faire toutes les représentations nécessaires pour que la rénovation soit encouragée et que dans ce cadre, que l’achat de matériaux de qualité le soit aussi. 

Cette conclusion est plausible tant que les gouvernements n’ont pas annoncé de programmes stimulant l’accès à la propriété. Je serais surpris que messieurs Legault et Trudeau ne bougent pas sur ce dossier. Je m’attends même à ce que l’industrie de la construction tant institutionnelle, commerciale que résidentielle fasse l’objet de programmes qui accéléreront la reprise. Après tout, la maison est devenue un enjeu politique. 

One comment on “Prévisions hasardeuses du marché résidentiel

  1. Quincaillerie C. Bélanger Ltée on

    Bonjour Monsieur Darveau,
    Très belle analyse qui reflète très bien la réalité et les enjeux à venir dans notre domaine.
    On paierait tous bien cher pour avoir une boule de cristal de la rénovation…

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